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la voie de l'homme

10 mai 2010

La raison de plus fou

Dis papa, pourquoi le crayon il est tout tordu?

Cette question dans mon foyer, les enfants chacun en leur temps, l'ont posée. Ils grandissent avec un crayon à la main, pour dessiner de leur monde les formes et les couleurs. Petit-à-petit le paysage s'enrichit, ils apprennent la perspective, les nuances de teinte, les effets de champs, la profondeur. Par curiosité ils jettent volontiers un oeil sur l'ouvrage du voisin. Premier étonnement: "dis papa, pourquoi c'est pas le même?" Bon, aujourd'hui travaux pratiques: la subjectivité. Comment on la "choisit", comment on peut en changer, plutôt que de la subir et s'y enfermer, et non, ça ne se mange pas... Deuxième étonnement: "dis papa, pourquoi les dessins souvent, y z'ont l'air tout embrouillés?" Ah ça mon coeur, c'est le crayon qu'est tout tordu, tout usé, quand son trait est confus, quand il part en tous sens en dépit de la main qui le tient c'est signe qu'il n'est pas adapté, aux exigences du papier.

Mais en refaire la pointe ne te servira de rien, si tu ne veilles pas en même temps, à décrisper ta main. Là tiens-le délicatement, ce n'est pas une bouée, et tu ne vas pas te noyer. J'en ai vu sais-tu, qui le serraient si fort qu'il a cassé, je les ai vus errer entre les éclats éparpillés. Et tant d'autres qui le brandissaient, tel un sceptre pour régner, sur leur gribouillis dérisoire.

(...à suivre)

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10 mai 2010

Ca raisonne

Parmi ces mécanismes dont on est tenté de faire l'apanage exclusif de l'humain, il en est un assez curieux: la raison. Pour le coup je l'admets, spécificité humaine il y a. Non pas dans l'outil cependant, mais dans la place qui lui est accordé, et dans l'usage particulièrement inapproprié qui en est fait. J'insiste sur ce point, épicentre de tant d'incompréhensions chez les bipèdes à moteur.

La raison est cette sentinelle au milieu de nulle-part. Une gardienne dans l'immensité du mental. Gardienne d'un fortin dédié à des fonctions précises, limitées et indispensables de traitement de l'information. Les employés sous ses ordres sont tous issus de la grande fratrie des sens organiques, bien plus nombreux d'ailleurs que le tapageur club des cinq toujours mis en avant. Lesquels filtrent, puisque c'est leur rôle, les émanations dont ils ont chacun la charge avant d'en rendre compte à la raison qui rédige alors une note de synthèse à l'attention de l'esprit des lieux, l'ego. Dont elle reçoit les directives. Sous sa forme naturelle, ou non dévoyée, cette organisation commune à un grand nombre d'espèces est tout simplement efficace, et relativement peu gourmande en énergie. Tout ce petit monde travaille main dans la main en bonne intelligence.

(...à suivre)

10 mai 2010

Dans le sens du poil

Il est un sujet qui occupe depuis fort longtemps la race des penseurs... Les penseurs des bibliothèques se sont lancés les premiers dans la pataugeoire, rejoints sur le tard par les penseurs des laboratoires: "quel est le propre de l'humain?"

Car il faut bien qu'il ait une particularité, cet humain! Lui qui se veut unique en son genre, si évidemment supérieur, splendide exception dans la cacophonie de la nature mise à sa disposition pour être maîtrisée et exploitée. Il est probable d'ailleurs, que l'enjeu de cette question ne soit pas tant la compréhension, que la justification.

"Quel est le propre de l'humain?"

Là-dessus les penseurs pensent, donc ils sont... Et ils affirment: le rire, la conscience (plus ou moins) réfléchie, le langage, l'âme, le feu, la compassion, l'outil, la chronologie, la morale, l'humour, l'amour, la violence, l'inhumation des morts, la politique, la guerre, l'intelligence, etc... Ces idées connaissent le succès, pour mille ans, trois siècles ou six mois. Parfois argumentées, rarement corroborées sinon de façon partiale et partielle.

Là-dessus les chercheurs cherchent, donc ils suivent... Et quand ils cherchent ailleurs que dans leur nombril ils tombent surpris, sur des faits qui réfutent les arguments et infirment les affirmations des penseurs qui pensent. Ca c'est pas de chance. A tel enseigne qu'aujourd'hui, les plus honnêtes ou les plus prudents d'entre tous ces éminents personnages n'osent plus s'accorder que sur ce seul point:

"Le propre de l'humain, est d'être impropre à lui-même."

Là-dessus l'éthologue plisse la truffe, et dresse l'oreille: "que de papier noirci, de salive évaporée, que d'efforts consacrés à regarder le monde cul par-dessus tête, pour en arriver maintenant aux prémisces du bon-sens! C'est un début prometteur. Permettez donc messieurs et mesdames les experts, que je vous l'emprunte le temps que vous décidiez quoi en faire..." Car enfin, il n'est pas besoin de trépaner un intellectuel, ni de disséquer un scientifique pour savoir comment ls fonctionnent... Entre autres faune, l'éthologue observe aussi les observateurs. Et les mouches et les fourmis, les renards, les pinsons, les vers-de-terre... Deux ou trois choses encore, qui seraient ici hors-sujet. Il s'intéresse tout autant à l'animal sauvage dans son environnement cohérent, qu'à l'animal captif, ou domestiqué, ainsi qu'aux altérations et dégénérescences, qu'induisent ces milieux. Ethologie: mise en lumière des comportements. Mais encore? Dame! La vie. Comment elle invente, expérimente, manifeste ses règles, comment ellle s'y conforme et comment parfois, elle les contourne.

Dès lors qu'il est question d'observation, il est question souvent, d'instrument. Toutefois, à quoi bon multiplier les intermédiaires, à quoi bon des lunettes toujours plus puissantes, vers le très-grand ou vers le très-petit (dimension qui soit dit en passant, rend caduques les "lois" du vivant telles que nous les décrivons), si l'oeil placé devant comprime les images dans un cadre prévisible et stéréotypé? Ce qui importe est bien la clarté dans l'oeil. Fort de ce constat l'éthologue se fait son propre instrument. Un instrument dépoussiéré dans l'étude des causes premières de la cécité: arrogance, confusion, rigidité... Pour ce faire pas besoin de chercher bien loin: par chance il s'avait déjà sous la main.

24 avril 2010

Un crime au paradis

2001, été

"Le Paradis", c'est le nom que Mme R. avait donné à sa ferme et aux terres qui l'entouraient. Accolée aux anciens bâtiments en pierre sèche une maison des années 70, parpaings et formica, belle comme un furoncle au milieu des vergers en terrasse et des éboulis calcaires, la rivière en contrebas, le tout niché dans une cuvette ensoleillée dans les gorges de l'Enfer. On accédait à l'endroit par quelques kilomètres de piste. La soixantaine bien frappée, handicapée par une jambe raide, Mm R. consacrait à ses chevaux toute sa bonne volonté. Mais la bonne volonté seule, suffit rarement. Une pouliche selle-français de cinq ans en particulier, lui causait de grands soucis. La pouliche avait grandi dans les collines seule avec sa mère qu'elle avait têtée jusqu'à quatre ans passés, des erreurs de la part des bipèdes lui avaient ôté à leur encontre tout respect, elle mordait, frappait et n'avait jamais pu être licolée. Quelques-uns, plus ou moins compétents avaient essayé et s'y étaient cassé les dents. Ce genre de cas m'intéressait. J'avais emmené un rond de longe démontable, bricolé par mes soins. 20 mètres de diamètre, 30 kilos, 30 minutes pour l'installer, le tout était assez pratique et me permettait d'intervenir en-dehors de toute structure.

Nous voilà donc en marche, la propriétaire, mes enfants et leur douce mère venus en balade pour l'occasion, et l'apprenti-sorcier qui tâche de se faire petit, sachant trop bien qu'à l'homme rien n'est jamais acquis... Le plat dont j'ai besoin pour travailler est plus haut, au pied d'une vieille borie.

Premier contact, l'animal sait déjà bien-sûr, à qui il a affaire. Tout le renseigne: odeur, regard, posture, respiration, texture des pensées, la façon dont vibre l'air... Je suis moins fin j'ai besoin de plus de temps, pour en apprendre beaucoup moins.

Hors-d'oeuvre: j'exige d'abord son attention, lui impose ma présence dont elle ne veut pas, elle est tendue et agressive. Je cherche et j'obtiens le "join-up" décrit par Monty Roberts, à cette époque je ne perçois pas encore bien toutes les limites de cette approche. Je la pousse sur le cercle, lui permets de me rejoindre au centre lorsqu'elle manifeste les signes adéquats, la touche, la pousse encore à main droite à main gauche, avec la chambrière au début ensuite le bras suffit, puis la seule position du torse qu'accompagne le regard aux 2/3 de la croupe. En une heure elle est licolée, soulagée elle ne bouge pas, reste le plus délicat...

Plat de résistance: quelques pas de danse. Il faut qu'elle s'en remette à moi, pas de compromis. Menée au licol, à chaque fois qu'elle pense pouvoir ruser je la destabilise, dans ses appuis comme dans ses présomptions, je change les régles de jeu dès qu'elle pense avoir compris. Elle cède, caresse, une porte est ouverte. Encore une heure et elle calque mes déplacements, marche trot arrêt, sans longe ni licol.

Le dessert, dernière touche à la désensibilisation des membres, de la tête, du ventre... conseils simples à Mme R. qui tient la pouliche. Tout ira à peu près bien par la suite.

Ravie elle s'exclame: "vous êtes un magicien, monsieur!"

Non. Je suis un abruti. Je sais sur quels leviers j'ai joué, et ça ne me plaît pas. J'en ai une vague nausée derrière les sinus. Le manque de temps bien-sûr, je suis bien conscient d'avoir pris des raccourcis, mais il n'y a pas que ça: j'ai exploité sa peur, parce que c'était le plus tentant le plus facile. Prédateur et proie, dominance et soumission, pression et confort, ça ne va pas... Même si tout n'est pas à jeter, celà ne mène à rien de neuf, il me faut trouver d'autres voies...

A d'autres moments je pourrais vérifier encore et encore, que décidément, ce n'est pas dans la forme du geste que réside la violence. A l'occasion même, la confrontation physique la plus intense pourra être empreinte d'infiniment plus de douceur, que ces fils grossiers tirés dans l'invisible, ce jour-là.

24 avril 2010

Histoire et personne

De certains autoportraits de Rembrandt, ceux peints dans sa maturité, moins d'une décennie avant sa mort, il se dégage une atmosphère originale. A cette époque il dépasse les conventions de son milieu, se fait irrévérencieux vis-à-vis de la bourgeoisie bien-pensante d'Amsterdam qui remplit sa gamelle, et se donne comme jamais à son Graal: s'abstraire dans la couleur, non plus peindre mais devenir peinture, réfléchir la lumière depuis l'obscur... Le trait est affirmé, et ne cherche pas à être flatteur. Dans le fond du tableau souvent, il esquisse un passage. Cette forme "d'art" je l'avoue n'est pas mon domaine, rien ne m'y porte, j'y suis aussi étranger qu'incompétent à l'analyser. Si j'en parle ici c'est à cause d'un détail qui m'a frappé il y a vingt-cinq ans: ses yeux. Son regard sur la toile, chose étonnante, n'est pas narcissique. On y distingue la tranquille assurance de qui s'est battu toute une vie contre des fantômes coriaces, la profondeur méditative, une lueur de malice aussi, mais rien de directif. C'est une peinture ouverte. Elle laisse ce sentiment que l'important n'est pas dans ce qui est montré, mais bien dans le regard du passant qui viendrait à l'effleurer.


Premier crayonné: j'appelle "histoire personnelle", une somme d'influences inscrites dans le vécu. L'expérience, interprétée, imprime ses traces dans les différents étages de la mémoire, sous forme de compulsions. Ces compulsions se traduisent en schémas de réactions. L'ensemble de ces réactions compose un bouquet d'attitudes par lequel la personne se définit. Ce bouquet que d'autres ont composé pour elle, la personne y est attachée, comme une bernique à son rocher: mon histoire, ma vie... MOI! Histoire et personne, par l'identification l'une fait l'autre. Et réciproquement.

De ceci que j'ai perçu très tôt comme une prison, je n'ai pas voulu pour moi-même. L'odeur des fleurs fanées ne m'a jamais attiré. Il vint donc un temps où, me sentant prêt, j'ai doucement retiré les fleurs du vase pour les rendre à leur néant, puis j'ai versé l'eau, et nettoyé le dépôt. Le vase je l'ai posé, et sans l'ombre d'un regret m'en suis allé...

Aussi ne prétendrais-je pas, par le biais de quelques scénettes déposées ici comme elles viennent, dessiner un portrait. Le portrait de qui, de quoi? Il me serait sincèrement impossible de le dire. J'ai hésité: est-ce bien utile? Oui utile peut-être, à illustrer l'ensemble? Dire que ces bribes ne me concernent pas plus que la plus petite part du rêve d'un autre, est sans doute exact. Mais un peu court. Finalement elles ne me concernent pas moins non plus.

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22 avril 2010

"Au commencement était le Verbe"...

Du grec philo, "j'aime" et logos, "le Verbe"... (et si l'on retient pour logos la traduction courante, philologie signifiera alors "science de l'amour", ça ne veut pas dire grand chose mais c'est joli quand même).

Du philologue on dit, pour faire court, qu'il étudie le langage. Et c'est juste, bien qu'incomplet... Du philologue on dit aussi, en un raccourci irréfléchi, qu'il est attaché aux mots. Et c'est une erreur. Est attaché aux mots celui qui se roule dedans et s'en repaît, lié par des câbles qu'il pense avoir lui-même tressés. Et bien plus encore, est attaché aux mots celui qui par crainte ou paresse les néglige, certain que l'essentiel n'est pas là, entravé par les ficelles du marionnettiste invisible à ses yeux il croit en user, quand il n'est qu'abusé par son jeu. Et certes il a raison sur ce point: l'essentiel n'est pas dans le mot. Mais tout juste derrière. L'essentiel est farceur, ce n'est qu'une fois le mot rendu transparent, vidé des mystères qui l'obscurcissent, qu'il se débusque en riant.

Du langage on dit, pour faire court, qu'il est outil de communication. Et c'est juste, bien qu'incomplet... (et quand bien même ne serait-ce qu'un outil, quel ouvrier serait assez fou pour le préférer désaffûté? Communication, quelle curiosité s'est-elle vraiment penchée jusqu'au bord de tomber, sur la margelle de ce puits sans fond? Quant à y descendre...). Toute définition recèle des pièges. Celle-ci par exemple qui est issue du consensus, suggère que le langage puisse être un pont. De loin peut-être, de plus près, ça ressemble furieusement à un mur! C'est ce mur, que le philologue déconstruit.

Le philologue avant tout, est observateur honnête. De cette honnêteté dans le regard critique appliqué d'abord à soi-même, qui est fruit de l'instinct bien plus que de grandes études que d'ailleurs il s'est bien gardé de faire. Sa "science" n'est certainement pas celle des livres, ni l'affaire du seul intellect. Sa langue est celle du changement, sous son apparente rigueur elle converse avec le vivant. Son sujet est l'accord. L'accord dans la tête en même temps, car c'est indissociable, que l'accord de la tête avec le corps. 

20 avril 2010

"Toi qui entre ici, abandonne tout espoir"...

Le proctologue est avant tout un explorateur. Sans crainte de l'obscurité il s'engage d'un doigt ferme, là où les autres n'ont pas envie d'aller: au fond des choses.

Le proctologe est expert ès trous-du-cul, en ses pathologies dont l'ensemble dessine ce grand symptôme qu'on appelle Humanité. Expert en ce domaine glissant, parce qu'expert en son propre fondement... Cette folie est sienne, aussi.

Quant à ceux-là les offusqués, bouche en fleur et nez pincé, qui brament en faisant des mines qu'ils n'ont pas d'anus, mieux vaut les laisser à leur perfection.

C'est important un trou-de-balle. C'est vital. Il est imprudent de le négliger. Qu'il soit bouché et voilà que saturé de toxines, l'on s'empoisonne. Trop dilaté par quelque diarrhée, et voilà qu'on en met partout... Je t'invite lecteur, à te pencher avec moi sur cette matière dont je fais ici mon sujet, et qui demande à être évacuée. Ce canal riche en parfums, le proctologue s'intéresse aussi aux moyens de le nettoyer, ça fait partie du métier. Mais foin de laisser-aller, il faut frotter! Certes avec douceur, sans quoi l'on s'irrite facilement. Frotter encore et encore jusqu'à ce que ça brille, "oh, j'me vois d'dans!" Et frotter encore, sans regrets effacer les reflets qui adhèrent... d'un bout à l'autre du tuyau laisser passer la lumière...

19 avril 2010

Préface

Après "plume d'éveil" (éditions Publibook), un vieux compagnon de caverne est sur le point de commettre un nouvel ouvrage, "rencontre d'une vie". Déposer ici la préface qu'il a eu la vacherie de me demander, me paraît être un bon préambule...


     "Il faut bien tenter de se rejoindre. Il faut bien essayer de communiquer avec quelques-uns de ces feux qui brûlent de loin en loin dans la campagne."

Antoine de Saint-Exupéry - Terre des hommes

    Il faut bien tenter, de dire l'indicible. S'il est un choix à faire entre se résigner ou accepter, entre l'à-quoi-bon et le pourquoi-pas, alors essayer est un geste nécessaire. Et tu essayes, mon ami, dans une langue si simple qu'elle s'adresse même - devrais-je dire surtout? - aux enfants.

    Longtemps j'ai cherché l'homme. Sous tous les vents, à la croisée de cent peuples, dans le reflet des miroirs, de l'homme je n'ai trouvé au mieux que la moitié apeurée. Colère et mépris, brouillard et peine immense, de tel alliage était, aussi loin qu'il m'en souvienne, l'enclume fidèle qui oppressait ma poitrine, sur laquelle nulle lame propre à trancher ne pouvait être forgée.

     Au détour de quinze années d'errance je me cognai à ton ombre. Dans l'évidence de la rencontre je me souvins brièvement que nous nous connaissions déjà. Une note et un silence au creux d'une partition plus vaste que nous, écrite toute entière au-dedans de nous. Sous l'écorce de la peau faite de la poussière et de la mémoire même des pierres il est un seul sang et dans ce sang une seule eau, dont le murmure ténu nous dit une source. Le chant de cette source était notre langage commun, en est-il besoin d'autre? Ainsi après l'errance, je sus qu'était venu le temps du voyage immobile: ne plus chercher enfin, mais se laisser trouver. Et tant à désapprendre!

    Car ce n'est point l'homme que je vis ce jour-là, mais juste son doigt. Et c'eût été illusion encore, que de croire l'homme caché derrière. Et c'eût été malentendu aussi, que d'attendre direction de ce doigt pointé, comme un panneau dans lequel tomber. Au bord d'un pays sans chemin, rien de plus qu'un jalon discret. Rien de moins que l'affirmation de tous les possibles.

     Les situations, les personnages de ce récit sont authentiques. L'adolescent, Ron Uribe. Manter le jardinier. L'idiot et le funambule. Le premier est aussi lourd de maux qu'avide de mots. Dans son sac comme un trésor, il porte mêlé à un passé desséché, l'héritage de son espèce, toutes choses qui le poussent à croire en sa souffrance autant qu'en un nécessaire remède. Il traîne dans sa chair une nostalgie puissante, sans pouvoir la nommer, car enfin peut-on être nostalgique de ce qui est à venir? Le funambule ne porte pas de sac. Et ses mains sont vides. La guérison n'est point son affaire. La ronde du maître et de l'élève n'est point sa danse. En équilibre sur le fil de son impeccabilité, vivant, familier du paradoxe il se tient là où l'accord engendre le mouvement. Dans l'intensité. Inlassablement l'idiot est conduit à confronter la foule bruissante de ses idées au verdict de l'action. Par-delà la contradiction embrasser puis traverser son animalité, pour éprouver le plein tendre vers le vide, jusqu'à sentir le fil sous ses pieds. Nature, "ce qui naît"... Et tel qui aspire à naître, ne peut s'enfanter que de lui-même. Connaître, "naître avec"... Et si comme l'explique Manter en ces pages, le savoir est à la connaissance ce que l'imperméable est à la pluie, il n'est alors qu'à se souvenir, que tout est déjà là...

    Il n'est pas assez de distance entre nous, Ron, pour des remerciements. Cette gratitude qui s'éprouve, qui nous lie, n'est pas affaire de personnes elle perdrait de son sens à se dire. Tout simplement, elle se respire... Qu'importe le bruit des pas accomplis. Ce n'est pas soi que l'on raconte. L'histoire est prétexte pour le témoin à évoquer ce qu'il ne peut ni ne doit définir, et qui occupe tout l'espace entre les mots.

     Voici une histoire.

    Voici l'homme, et son amour.

     "Ainsi l'essentiel du cierge n'est point la cire qui laisse des traces, mais la lumière."

    Antoine de Saint-Exupéry - Citadelle

    

    

19 avril 2010

Blog

Extraits de conversations, l'endroit reste ouvert et il y a tout ce qu'il faut pour un pique-nique: EL CABALLERO SIN CABALLO

18 avril 2010

Forum

Un endroit chaleureux où il ne s'est pas dit que des conneries. Il s'en est aussi écrit beaucoup... PARLONS UN PEU

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